Refusez l'exploitation des animaux dans les musées

Refusez l'exploitation des animaux dans les musées

Lancée le
14 avril 2019
Adressée à
Monsieur Nicolas Liucci-Goutnikov, Commissaire d’exposition
Signatures : 727Prochain objectif : 1 000
Soutenir maintenant

Pourquoi cette pétition est importante

Lettre ouverte à l’attention de

Monsieur Serge Lasvignes, Président du Centre Pompidou,

Monsieur Bernard Blistène, Directeur du Musée National d’Art Moderne et du CCI,

Monsieur Nicolas Liucci-Goutnikov, Commissaire d’exposition,

 

 

Il y a en ce moment un poisson solitaire qui tourne désespérément dans un aquarium désert au 4ème étage du Centre Pompidou, derrière un petit cartel où vous pouvez lire : Mobile vivant. Ce n'est pas un aquarium, le volume de ce récipient en verre est inférieur au volume règlementaire d'un aquarium, l'eau n'est pas même filtrée et ce poisson ne souffre pas seulement de la solitude, il est en train de s'asphyxier sous nos yeux.

C’est une œuvre connue d’Isidore Isou, qui date de 1962. Elle succédait en fait à une œuvre de 1960 où le mobile vivant était interprété par un oiseau qui mourut après une performance de quelques semaines. Nombreux sont les poissons qui sont morts à leur tour pour interpréter une œuvre – dont on a pu penser, par ailleurs, qu’elle n’était peut-être pas une des plus intéressantes de l’artiste, tout au moins de nos jours où certaines ficelles ont été tant utilisées qu’elles semblent avoir perdu toute signification.

Néanmoins, replacée dans le contexte du parcours personnel de l’artiste et de l’époque, l’œuvre, évidemment, prend un sens. Et il est probablement impossible de faire un travail d’historien si on n’accepte pas de contextualiser.
A la fin du 19ème siècle et jusqu’à la première moitié du 20ème siècle, les expositions d’enfants, d’hommes et de femmes capturés en Afrique, en Patagonie, en Australie ou en Laponie se sont démocratisées et un public très nombreux, certainement aussi honnête et tout autant capable d’empathie et de générosité que nous, public contemporain, est venu regarder des aborigènes désespérés, des enfants de Patagonie, des Pygmées mourant de froid dans des cages,  sans éprouver la moindre émotion sinon l’excitation joyeuse que procure l’exotisme. On a exhibé dans des ménageries itinérantes, sous les yeux de familles très semblables aux nôtres, des êtres humains misérablement exploités, souffrant terriblement, et le succès de ces cirques ne se démentait jamais. Lorsque nous nous représentons cela, nous sommes horrifiés et nous ne pouvons pas nous le représenter trop précisément car notre cœur se brise. Nous ne pouvons imaginer cela, tant de cruauté, nous ne pouvons la concevoir. Et cette cruauté qui nous est inconcevable, si nous voulons l’appréhender, nous devons la replacer dans son contexte qui est le contexte de l’ignorance.

Ce qui était toléré en 1962 n'est plus tolérable en 2019, au moment où d’innombrables villes de province, de grandes capitales étrangères interdisent l’exhibition d’animaux dans des cirques, interdisent la vente et l’utilisation de petits aquariums.

Le 17 février 2015, a été publiée au Journal Officiel la loi donnant enfin à l’animal un statut d’ être vivant doué de sensibilité, loi qui nous place très en avance sur les autres pays européens dans la reconnaissance témoignée aux espèces différentes de la nôtre.

Le poisson exposé en captivité au Centre Pompidou n’est peut-être déjà plus le poisson qui y est arrivé le 8 mars, date du vernissage de l’exposition. D’autres sont peut-être déjà morts sans que le public n’en sache rien. Car si je ne soupçonne pas un instant Monsieur Liucci-Goutnikov de manquer de compassion ou d’être capable d’actes de cruauté conscients, j’imagine aisément qu’étant l’expert en art moderne et art contemporain qu’il est, il a eu peu de temps à consacrer à l’ichtyologie ou même seulement à l’approfondissement de connaissances de base sur les poissons rouges ou cyprins dorés.

L’espérance de vie d’un poisson rouge en captivité est de trente ans et sa taille adulte de 45 cm.  Les poissons vivent en bancs, tous ceux qui étudient les poissons rouges respectueusement, notent leur désir de contact et à quel point ils peuvent se montrer affectueux. Les tenir dans la solitude, confinés dans de petits espaces est une forme de barbarie. Il faut se représenter que c’est une torture pour eux. Seuls, ils ne vivent pas, ils survivent. Ils ont besoin d’un grand volume de nage – au moins 100 litres par individu- et, depuis l’arrêté du 11 août 2006, ils sont sur la liste des animaux domestiques et à ce titre, protégés légalement contre la maltraitance. Les aquariums dont le volume est inférieur à 100 litres par individu (ce qui est le cas de celui du Centre Pompidou) étant un des signes les plus communs de maltraitance, sont donc interdits. D’autres besoins physiologiques élémentaires doivent être respectés, filtration de l’eau, température, respect du cycle de l’azote, introduction de plantes et de bactéries, ces besoins ne sont pas respectés par le Centre Pompidou.
Lorsque les propriétaires de poissons rouges découvrent que, par ignorance, ils torturent des êtres sensibles et les font mourir dans la solitude d’une prison insalubre, cela les bouleverse. C’est pourquoi le directeur de l’Aquarium du Trocadéro, Monsieur Alexis Powilewicz  et le conservateur, Monsieur Guillaume Eveillard, en charge de 500 espèces différentes, dont beaucoup sont infiniment plus rares, ont décidé de créer un refuge qui accueille tous les poissons rouges que leurs maîtres, quand ils prennent conscience du degré de souffrance qui est le leur, se décident à leur confier.

J’ai la certitude que Monsieur Nicolas Liucci-Goutnikov, à qui le temps de s’informer sur les points qui viennent d’être évoqués a manqué, aura la compassion de confier sans attendre ce petit poisson, qui s’affaiblit chaque jour et qui, réellement, est en danger de mort, aux bons soins de la direction de l’Aquarium du Trocadéro. Et j’ai confiance qu’avec l’intelligence subtile qui est la sienne, il saura installer un cartel à l’emplacement désormais vide, qui fera honneur au créateur du lettrisme.

Il nous est difficile de ne pas juger les créateurs de zoos humains, les directeurs des cirques Barnum ou Hagenbeck, il nous est difficile de ne pas juger la communauté scientifique ou, plus généralement, intellectuelle, qui les a si longtemps soutenus, ils nous horrifient, et seul le souvenir des quelques hommes qui se sont élevés contre eux, contre des actes d’une barbarie inouïe, des hommes qui ont été de plus en plus nombreux à mesure que le temps passait, nous réconcilie avec leur époque. Nous serons jugés à notre tour, par les générations futures, chacun d’entre nous, sur notre capacité à nous élever contre l’exploitation et la torture d’espèces dites « inférieures » ou sur notre complicité avec les tortionnaires. Le temps s’accélère et les prises de conscience aussi, nous seront jugés plus vite que nos prédécesseurs, j’imagine facilement que nous serons jugés de notre vivant et que de notre conception de l’éthique nous aurons à répondre.

Les animaux sont sous notre responsabilité. Ils sont vulnérables. Nous attendons du Centre Pompidou un geste visionnaire, dont on se souviendra. Que ce soit le premier Musée de stature internationale qui décide de ne plus accepter l’exploitation d’êtres vivants dans ses espaces.

 

  Bethsabée Ben Soussan

 

 

Copie envoyée à

Monsieur Alexis Powilewicz, Directeur de l’Aquarium du Trocadéro,

Parti Animaliste,

Fondation Brigitte Bardot,

One Voice,

Association Française du Poisson Rouge

 

 

Soutenir maintenant
Signatures : 727Prochain objectif : 1 000
Soutenir maintenant
Partagez cette pétition en personne ou ajoutez le code QR aux supports que vous imprimez.Télécharger le code QR

Décisionnaires

  • Monsieur Nicolas Liucci-Goutnikov, Commissaire d’exposition