Huit principes pour une gouvernance de la sécurité nucléaire

Huit principes pour une gouvernance de la sécurité nucléaire

Lancée le
12 septembre 2023
Signatures : 3 273Prochain objectif : 5 000
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Pourquoi cette pétition est importante

Le 19 juillet 2023, à l’issue du Conseil de politique nucléaire, la Ministre de la transition énergétique a été chargée de préparer d’ici l’automne un projet de loi visant à fusionner l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Ce projet, qui avait été rejeté par le Parlement au printemps, est donc de retour. Cette annonce rouvre une période d’incertitude quant à l’organisation de la sécurité* nucléaire qui risque d’être durablement déstabilisée. Experts, chercheurs, exploitants, citoyens parties prenantes de la gouvernance de la sécurité nucléaire, nous lançons un appel aux parlementaires pour qu’ils préservent les huit principes qui fondent la robustesse et l’efficacité du système actuel, fruit d’un long processus de maturation.

*« La sécurité nucléaire comprend la sûreté nucléaire, la radioprotection, la prévention et la lutte contre les actes de malveillance, ainsi que les actions de sécurité civile en cas d'accident », loi TSN du 13 juin 2006.

Principe n°1 : Les Autorités de l’Etat chargées de la sécurité nucléaire sont indépendantes des exploitants nucléaires

L’indépendance entre Autorité (décision, réglementation, inspection) et Exploitant est une déclinaison du principe d’indépendance entre juge et partie, qui définit qu’on ne peut pas rendre une décision juste et crédible lorsqu'on a un intérêt à la décision rendue.

Principe n°2 : L’Expert public des risques nucléaires et radiologiques est indépendant des exploitants nucléaires

L’indépendance entre Expert et Exploitant est également une déclinaison du principe d’indépendance entre juge et partie, qui définit qu’on ne peut pas réaliser une expertise juste et crédible d’un projet dont on est le promoteur.

Principe n°3 : L’organisation sépare clairement les fonctions d’expertise et de décision

La séparation des fonctions d’Expertise et d’Autorité est reconnue sur le plan international, notamment dans le domaine des risques sanitaires et environnementaux : l’évaluation des risques préalable à une décision ne doit pas être sous le contrôle du décideur et de ses contraintes. La publication des conclusions de l’Expert, préalablement à la prise de décision, est une condition de l’autonomie de l’Expert. Cette autonomie ouvre des possibilités de dialogue direct entre Expert et Autorité (mise en débat des difficultés de traduction de l’expertise en décision), entre Expert et Exploitant nucléaire (mise en débat des arguments scientifiques et techniques de l’évaluation des risques), et entre Expert et Société civile (mise en débat des préoccupations du public). Ce dialogue direct contribue à la qualité de l’expertise et de la décision, à leur crédibilité et à la confiance du public.

Principe n°4 : L’Expert public réalise des recherches scientifiques en support à ses expertises

L’expertise doit mobiliser les connaissances scientifiques les plus à jour pour évaluer les risques nucléaires et radiologiques. Ces connaissances doivent être continuellement améliorées compte tenu de l’émergence de nouvelles thématiques (par exemple : changement climatique, cybersécurité, stockage des déchets), des évolutions technologiques (par exemple : petits réacteurs modulaires), etc. La réalisation de recherches par l’Expert lui-même, en tant qu’organisme de recherche, assure l’adéquation des apports de la recherche avec les besoins de connaissance présents et futurs de l’expertise et contribue à l’indépendance de jugement de l’Expert.

Principe n°5 : L’Expert public examine l’ensemble des dimensions de la sécurité nucléaire

Des liens étroits existent entre les dimensions de la sécurité nucléaire (sûreté, radioprotection, protection contre la malveillance et gestion de crise) qui doivent faire l’objet d’une approche globale. L’expertise en sûreté et l’expertise concernant la malveillance vont considérer des événements initiateurs différents (aléas internes ou externes pour l'un, malveillance pour l'autre), mais elles doivent ensuite examiner les dispositions de maîtrise des risques induits en veillant à leur compatibilité, voire leur complémentarité. L’évaluation du risque radiologique nécessite également de pouvoir étudier et mettre en relation la source du risque et ses effets sur les populations et l’environnement, notamment en situation de crise. Pour ce faire l’Expert mobilise des spécialistes des différentes dimensions du risque et des généralistes chargés d’élaborer une vision d’ensemble.

Principe n°6 : L’Expert public évalue les installations civiles et celles relevant de la Défense nationale

Ce principe résulte de la nécessité d’assurer un même niveau de protection des populations et de l’environnement autour de chaque installation, qu’elle soit civile ou relevant de la défense. Cette prise en charge de l’ensemble des installations par un Expert unique permet également de développer des approches de sûreté cohérentes, y compris en situation de crise. Elle permet enfin une approche globale des accidents susceptibles d’affecter les installations nucléaires relevant de la défense, dont les retombées radiologiques toucheraient les populations et les territoires.                                                                                                                  

Principe n°7 : L’Expert public développe un dialogue permanent avec la société civile

Ce principe résulte de la nécessité pour un Expert public, de prendre en compte dans ses travaux les préoccupations du public, de contribuer au développement de sa compréhension des risques radiologiques et de l’impliquer activement dans l’évaluation des risques. Ce dialogue est un facteur de crédibilité de l’Expert et de confiance du public, particulièrement indispensables dans une période de relance de l’industrie nucléaire.

Principe n°8 : L’Expert public et les autorités disposent des moyens financiers, des effectifs et de l’attractivité salariale et sociale, nécessaires à la réalisation de leurs missions

Plusieurs rapports attestent que les moyens donnés aujourd’hui en France à l’Expert et à l’Autorité sont insuffisants pour qu’ils assurent correctement toutes leurs missions. Il s’agit donc de donner les moyens financiers nécessaires à la maintenance du patrimoine scientifique et immobilier, les moyens pour le développement et l’exploitation de plateformes expérimentales, les effectifs nécessaires pour couvrir l’ensemble des domaines de compétences et de mettre en place une politique salariale et sociale permettant d’attirer, de motiver et de retenir les talents.

Signataires :

Sophie BINET (Secrétaire Générale de la CGT), Claude BIRRAUX (membre honoraire du Parlement, ancien président de l’OPECST), François HOMMERIL (Président confédéral CFE-CGC), Jean-Yves LE DEAUT (membre honoraire du Parlement, ancien président de l’OPECST), Dominique LE GULUDEC (ancienne présidente du conseil d’administration de l’IRSN), Marylise LEON (Secrétaire Générale de la CFDT), Jacques REPUSSARD (ancien directeur général de l’IRSN, Président de l’Institut pour la Maîtrise des Risques), Philippe VESSERON (Ancien délégué aux risques majeurs), Cedric VILLANI (Mathématicien, ancien président de l’OPECST)

 

Christine ARGILLIER (membre du conseil scientifique de l’IRSN), Christophe BADIE (Chef de département, UK Health Security Agency), Michel BADRE (président du Comité ouverture et impulsion du dialogue avec la société civile sur l'expertise de l'IRSN), Robert BAROUKI (Président du conseil scientifique de l’IRSN), Isabelle BARTHE (membre du Comité Ouverture et impulsion du dialogue avec la société civile sur l’expertise de l’IRSN), Patrick BIANCHI (membre du Comité d’Orientation des recherches de l’IRSN et membre du Haut Comité pour la Transparence et l’Information sur la Sécurité Nucléaire), Guillaume BLAVETTE (membre du Comité Ouverture et impulsion du dialogue avec la société civile sur l’expertise de l’IRSN), Philippe BOURACHOT (Délégué CGT IRSN), Dominique BOUSQUENAUD (Secrétaire général de la Fédération Chimie Energie CFDT), Thierry CHARLES (ancien directeur général adjoint de l’IRSN), Luc CODRON (Délégué CFE-CGC IRSN), Jean Paul CRESSY (représentant CFDT au Comité d’Orientation des Recherches de l’IRSN), Pascal CUENDET (Délégué CFE-CGC IRSN), Jacques DELAY (représentant CFE-CGC au Comité d’Orientation des Recherches de l’IRSN), Catherine DELGOULET (enseignante-chercheuse), Stéphane DESTUGUES (Secrétaire général de la Fédération Générale des Mines et de la Métallurgie CFDT), Marcel GOLDBERG (Professeur émérite d'épidémiologie), Franck GUARNIERI (Directeur de recherche, Mines Paris / PSL), Christian HOLBE (Représentant CGT au Comité d'orientation des  recherches de l'IRSN), François JEFFROY (Délégué CFDT IRSN), Alain KAUFMANN (membre du Conseil scientifique de l’IRSN), Jean-Paul LACOTE (membre du Comité Ouverture et impulsion du dialogue avec la société civile sur l’expertise de l’IRSN),  Sébastien LAMBERT (Représentant CFDT au Bureau du Comité Stratégique de la Filière du Nucléaire), Nevena LATIL-QUERREC (Déléguée CGT IRSN), Louis LAURENT (membre du conseil scientifique de l’IRSN), Philippe LORINO (professeur émérite à l’ESSEC), Elsa MERLE (membre du conseil scientifique de l’IRSN), Simon SCHRAUB (ancien membre du Conseil d’orientation des Recherches de l’IRSN), Michele SEBAG (membre du conseil scientifique de l’IRSN), Tatiana TAURINES (Déléguée CFDT IRSN), Pierre TOULHOAT (membre du conseil scientifique de l’IRSN), Marc VERWERFT (Membre du Conseil Scientifique de l’IRSN), Denis VEYNANTE (membre du Conseil scientifique de l’IRSN).

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