Pour le respect de la mémoire des Victimes de l'esclavage colonial

Pour le respect de la mémoire des Victimes de l'esclavage colonial

Lancée le
9 avril 2024
Signatures : 661Prochain objectif : 1 000
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Pourquoi cette pétition est importante

Lancée par Coline MERLO-BLANC

Samedi 30 mars, des habitants de Saint-Denis interloqués s’interrogent : sur la place Victor Hugo, dans les anciens jardins de l’hôtel-Dieu qui prolongent le parvis de la Basilique, au lieu de la sculpture d’hommage aux victimes de l’esclavage colonial, il n’y a plus qu’un vide.

Comment dit-on qu’on regarde une absence ? demande Zahia, membre du comité local du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples. Comment on dit cette sidération, de voir que les noms de 213 personnes ne sont plus là? 

Sur le socle d’où a été déplacée la sculpture, en effet, il n’y a rien. 

Ni plaque expliquant son retrait, ni mention du lieu où elle est conservée, ni annonce de sa réinstallation. 

Les 213 noms évoqués par Zahia sont ceux de 213 Nouveaux Libres, gravés chacun à la main sur des médaillons émaillés, qui figurent sur la sculpture à la mémoire des Victimes de l’esclavage colonial. À l’abolition de l’esclavage, les officiers de l'état civil inscrivent les noms de 230 000 nouveaux citoyens français sur les registres. Parmi leurs descendants, accompagnés dans leur recherche mémorielle par le Comité Marche du 23 mai 1998 [CM98], 213 personnes avaient désiré voir figurer le noms de leurs aïeux et leurs aïeules dans l’espace public. 

L’œuvre commandée par le CM98 au sculpteur Nicolas Cesbron est une œuvre de réconciliation avec la mémoire nationale. Il ne s’agit pas d’une œuvre sinistre, ni vindicative. Les médaillons portant les noms ponctuent les segments courbes de la sculpture conçue comme une cosse emprisonnant du vide : en les faisant apparaître dans l’espace public, magnifiés dans une œuvre d’art c’est la reconnaissance de leur pleine citoyenneté qui était montrée. L’inauguration du monument avait été un temps de recueillement, de solennité. 

C’est ce lieu de mémoire qui a été soustrait soudainement aux regards. En réaction, des habitantes et des habitants de Saint-Denis, de concert avec le Comité Marche du 23 mai 1998, l’association Sonjé et le sculpteur se retrouvent à un rassemblement qui avec des fleurs, qui, des portraits, un livre, une pierre... pour ériger sur son socle un cairn signifiant leur désaveu de la méthode. C’est ce que relève l’ancien président du CM98, Serge Romana : une « erreur de méthode ». On ne confie pas à la veille d’un week-end de Pâques le déplacement d’un monument mémoriel à un entrepreneur privé, pour l’entreposer au Centre technique municipal sans soins, ni publicité. Il rappelle également que la sculpture a été offerte par le CM98 à la ville de Saint-Denis. 

L’élu aux questions mémorielles de la ville prend la parole pour tenter de minimiser la portée de l’acte : le monument n’a pas disparu, son déplacement était convenu depuis longtemps, l’artiste et l’association commanditaire en étaient informés, la sculpture rejoindra le 23 mai 2024 une place voisine.

Ce n’est pas tout à fait ce que rapportent l’actuel président du CM98, Emmanuel Gordien, ni le sculpteur Nicolas Cesbron. Emmanuel Gordien parle d’« une faute symbolique majeure », qui demande à être reconnue publiquement et à la présentation d’excuses. Le sculpteur bouleversé décrit une « négligence qui ne prend pas la mesure » des enjeux mémoriels. Il avait en effet été convenu que la sculpture serait déplacée, en présence de l’artiste et des associations commanditaires avec les précautions requises, et lors d’une cérémonie. Des membres du CM98 avaient témoigné vouloir être présents.

Aujourd’hui, où en est-on ? 

La Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage mentionne toujours sur son site la place Victor Hugo comme lieu d’implantation du monument. 

La municipalité n’a pas formulé d’excuses publiques. Ajoutant une dérision assez malvenue à la faute, des tables de ping-pong ont été posées samedi devant l’emplacement du cairn des habitants. 

Que doit-on comprendre ? 

Que les Jeux (ou des jeux) se substituent à la mémoire de notre Histoire  ? 

Qu’une sculpture conçue comme un hommage aux Victimes de l’esclavage colonial peut être déplacée sans respect des engagements pris auprès de l’artiste, des commanditaires ? Et sans respect des personnes touchées ?

Que parmi les questions mémorielles, l’accession à la citoyenneté de 230 000 personnes, dont les 213 noms sont une métonymie symbolique, peut être entreposée ? 

Qu’il ne faut pas « exagérer » (propos du maire), pour « une boulette » (le même)?

… Est-ce qu’on peut revenir sur terre ?

Lors du rassemblement improvisé, les représentants de la ville ont apporté des explications au déplacement du monument. Selon l’adjoint aux questions mémorielles, « la sécurité » de la sculpture serait mieux garantie en quittant la place centrale de la ville, celui où se dressent le bâtiment de la mairie et de la Basilique. Pour la cheffe de cabinet, l’espace serait mieux utilisé en y accueillant un manège pour enfants, pour l’heure installé face à la basilique. 

Sans être designers en aménagement ou en sécurité urbaine, nous pouvons témoigner de notre attachement à ce lieu de mémoire symbolique dans la ville. Nous tenons à son propos, à sa beauté et à son inscription dans un des lieux centraux les plus passants de notre commune de banlieue.

Le monument est toujours recensé à sa place sur le site de la Fondation pour la Mémoire de l’esclavage. Nous demandons à ce qu’il la reprenne. 

Des habitantes et des habitants de Saint-Denis, dont :

 


Coline Merlo, critique 

Zahia Oumakhlouf, retraitée et militante

Fiona Meadows, architecte

Corinne Coloneaux, militante associative

Benedetta Jumpertz, dionysienne et conseillère citoyenne du quartier DBS

Chafia Djemane, militante associative et Dionysienne

Jaklin Pavilla, ancienne première adjointe au maire de Saint-Denis et membre fondateur de l’association Sonjé

Juliette Seydi, journaliste retraitée et ex-présidente de Sonjé

Willy Wainqueur, photographe 

Sébastien-Camille Freudenthal, Dionysien.ne, médiateur scientifique, organisatrice des Folles soirées dionysiaques 

Françoise Davisse, documentariste

Hélène Dufour, musicienne

Françoise Jamme, militante associative

Nouria Diallo-Ouedda, habitante de Saint-Denis

Sylvie Solana, retraitée

Sonia Gomar, militante associative

Sabine Delaunay, citoyenne

Martine Dubail, citoyenne et habitante de Saint-Denis

 Michèle Larrouy, militante et enseignante en histoire des arts

Anne Perrot, habitante de Saint-Denis

Claudie Gillot-Dumoutier, Dionysienne, militante associative et politique

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